Adrien « La Main Froide » Bayonnais au destin hors du commun

Adrien Estebeteguy – Alias « Adrien la main froide » – Alias « Le Basque »

Si de nombreux Bayonnais ont brillé par leurs faits d’armes, leur esprit d’entreprise ou leur inventivité, il en est un qui s’est fait connaître pour de toutes autres raisons…

Adrien Estebeteguy issu d’une vieille famille bayonnaise, était l’archétype du malfrat de haut vol en cette première moitié du 20ème siècle.

Adrien aux surnoms bien portés, en effet son patronyme pouvait difficilement lui épargner « Le Basque », tout comme « La Main froide » était particulièrement adapté à ses méthodes expéditives visant à décourager toute concurrence…

Adrien Estebeteguy – Alias « Adrien la main froide » – Alias « Le Basque »

Il faut bien dire que tel « Rocco », Adrien et ses frères ont toujours très peu goûté le travail manuel, estimant sans doute à juste titre, que leurs talents méritaient des activités professionnelles bien plus rémunératrices.

Mais revenons à Adrien, il fut tour à tour truand, détenu, kidnappeur, puis collabo pour finir… victime !

Force est de constater qu’il aurait pu se vanter d’avoir rencontré dans sa vie deux (sinistres) célébrités, le premier « Henri Lafont » qui l’aura utilisé pour son entreprise criminelle, le second « Marcel Petiot » qui l’aura utilisé pour… alimenter sa chaudière !

Mais… qui était Lafont ?

C’est en 1940 qu’Henri Lafont collaborateur de haut vol, très apprécié par la Gestapo se rend à la prison de Fresnes pour y faire libérer 27 détenus qui constitueront son équipe, bien entendu « Adrien la Main froide » fait partie des « lauréats ».

C’est notamment à partir de ce noyau dur, que Lafont constituera la fameuse « Carlingue » de la rue Lauriston à Paris.

Henri Louis Chamberlin alias « Henri Lafont »

Cette organisation criminelle en relation directe avec la Gestapo avait pour « objet social » :

  • La gestion de bureau de rachat de devises, d’or, de meubles à des prix bradés pour le compte de la Wehrmacht.
  • Le pillage en règle des biens de Juifs qu’ils avaient identifiés, et qu’ils menaçaient de dénonciation (pour mieux les dénoncer ensuite).
  • Enlèvements en tous genres.
  • Tentatives d’infiltration des réseaux de résistants afin de communiquer le plus d’informations possibles à la Gestapo, qui en retour leur octroyait des pouvoirs au-delà de leurs attentes.

En synthèse : dépouiller le plus de gens possible !

Vous l’aurez compris, notre Adrien la main froide dont le cursus lui confère alors une expertise recherchée, excelle sur l’ensemble de ces « prestations ».

Un jour, sans doute soucieux du travail bien fait, il accompagne Lafont à  Bordeaux pour tenter de retrouver l’un des chefs de la résistance, le Belge Lambrecht recherché par l’Abwehr.

Après quelques nuits de beuveries dans les bars de la ville, un policier lui indique que Lambrecht est à Toulouse et lui donne son adresse.

Les deux compères se rendent alors à Toulouse où ils arrêtent Lambrecht, et le ramènent pieds et poings liés à Paris au siège de la Gestapo, dans le coffre de leur voiture.

Le résultat aboutit à l’arrestation d’un réseau de 600 personnes !

Encore un « fait d’armes » à porter notamment au crédit d’Adrien le Basque…

Et le Docteur Petiot dans tout ça ?

C’est alors que les choses commencent à mal tourner pour Adrien, qu’il va rencontrer un peu par hasard, la seconde célébrité de sa triste existence, j’ai nommé le Docteur Petiot.

Marcel André Henri Félix Petiot, dit le docteur Petiot

Adrien a en effet entendu dire qu’un médecin parisien disposait de contacts, pour évacuer discrètement ceux qui le souhaitaient vers l’Argentine.

Au vu du contexte, il s’empresse de rendre visite à ce dernier dans son hôtel particulier du 21 rue Le Sueur à Paris.

C’est comme convenu entre les deux hommes, qu’Adrien revint quelques jours plus tard chez Petiot avec une valise contenant devises, or, bijoux, faux papiers, bref le kit complet du truand en partance, censé lui permettre de s’installer confortablement outre Atlantique.

Les 72 valises retrouvées chez Marcel Petiot

Le piège se referme

Mais ce soir-là, la suite ne se déroule pas tout à fait comme il l’envisageait, le docteur Petiot sous prétexte de lui injecter un vaccin, lui injecte en réalité une dose mortelle de poison.

Il demande alors à Adrien de patienter dans une pièce triangulaire, insonorisée et sans fenêtre. L’un des murs est équipé d’un judas, permettant à Petiot de s’assurer que son « vaccin » a fait son effet, qu’il peut retirer le corps et surtout récupérer le contenu de la valise qui désormais lui appartient.

La « thérapie » du Docteur Petiot l’aura finalement enrichi des biens cumulés des 27 victimes qui ont toutes fini dans… sa chaudière !

Notre Adrien a donc bien profité de la chaleur, mais pas de celle du soleil Argentin !

Petiot pour sa part achèvera son voyage dans la cour de la prison de la Santé le 25 mai 1946 à 5h07, ou il est guillotiné.

À l’inverse de Landru qui était plutôt partisan de « La femme au foyer* », Petiot lui ne faisait pas de distinction, qu’ils soient hommes ou femmes tous finissaient dans sa chaudière.

*Pardon mais je n’ai pu m’en empêcher.

Quant à Henri Lafont, le 26 décembre 1944 au moment d’être fusillé au fort de Montrouge, il déclare à son avocate « Je ne regrette rien, Madame, quatre années au milieu des orchidées, des dahlias et des Bentley, ça se paie ! J’ai vécu dix fois plus vite, voilà tout. Dites à mon fils qu’il ne faut jamais fréquenter les caves. Qu’il soit un homme… comme son père ! »

Ainsi s’achève l’histoire de l’une des plus grandes figures du banditisme que Bayonne ait vu naître…

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Histoire de 4 pêcheurs Bayonnais d’antan…

Nul n’est besoin d’habiter un port de pêche pour devenir pêcheur, c’est le genre de devise qu’auraient pu déclamer 4 Bayonnais véritables accros du bouchon et du moulinet.

Même s’il leur arrivait (rarement) de changer d’emplacement, chacun d’entre eux avait son lieu de prédilection, et tous voyaient d’un (très) mauvais œil l’arrivée de « touristes » canne à pêche en main…

Je précise tout de suite qu’étaient considérés comme touristes tout « concurrent » provenant d’un périmètre extérieur au carreau des Halles… et j’exagère à peine !

En la matière le plus virulent des quatre pouvait prendre jusqu’à 5 points de tension (à minima) rien qu’à la vue d’une canne autre que les siennes…

Milou

Toujours discret, cet homme assez grand et mince au dos légèrement vouté par une rude vie de labeur et le poids des années, aimait plutôt se rendre sur le pont Marengo à la marée montante.

Equipé de ses deux « lancers lourds » comme on les appelait alors, il avait pour habitude d’accrocher à ses hameçons des lanières de chipirons qu’il avait soigneusement découpées au préalable.

Gamin, je l’ai observé durant de longues années dans l’espoir de lui soutirer quelque astuce qui me permettrait d’attraper d’aussi gros poissons que lui.

Je sais que sa fille suit cette page, si elle a des anecdotes, je suis preneur…

Bijoutier de la rue Pannecau

A l’opposé de Milou, c’est-à-dire sur le pont Pannecau, le bijoutier de la rue du même nom, œuvrait de la même façon, même matériel, mêmes appâts, même objectif, même marée montante.

Ce qui me fait sourire c’est que Milou et le bijoutier (dont j’ai oublié le nom) ont péché durant des années sur « leurs » ponts respectifs, sans quasiment jamais se voir puisqu’ils suivaient tous les deux le sens du courant.

Quoi qu’il en soit, le résultat était probant puisque ses captures n’avaient rien à envier à celles des autres cadors de la place.

Luisito

Alors lui, je le considérais comme un phénomène, de petite taille, la peau tannée par le soleil et toujours vêtu de sa chemise multicolore à gros carreaux.

L’été vers 12h30, Luisito se postait toujours sur le quai devant les Halles, cet emplacement faisait partie intégrante de sa stratégie (payante).

En effet dans les anciennes halles les étals de poisson se trouvaient au 1er étage, les poissonniers avaient pour habitude avant de fermer, de jeter à la Nive les abats et autres déchets de poisson.

Il va sans dire que cette manne attirait tous les poissons dans un rayon de 30kms, bon d’accord un peu moins peut-être.

Et c’est là que notre Luisito entrait en scène, il utilisait une longue canne à bouchon. Pour l’avoir très souvent observé, je me souviens même que le dessus de son bouchon était rouge et blanc.

Il appâtait au thon…

Pour cela il suffisait d’acheter une tête (de thon) aux poissonniers qui la vendaient alors 1 Franc (Maison Peyroutet par exemple).

Là commençait le festival ! Des muges d’un, voire deux kg, bref les plus gros du secteur se ruaient sur son hameçon, d’un geste vif et précis il les accrochait, et en fonction de leur taille les remontait de suite ou patientait un peu pour les fatiguer.

Mais il arrivait que ce soit une louvine qui se fasse prendre, alors là, c’était un véritable festival, Luisito usait de toutes sa technique pour ne pas la perdre, pendant qu’un des « spectateurs » se saisissait d’un trapiaud pour l’aider à la capturer, ça c’était à marée haute, à l’inverse, c’est-à-dire à marée basse, il y avait toujours quelqu’un pour descendre dans les rochers via l’échelle qui se trouvait à l’angle du pont Pannecau, l’intéressé se donnant pour mission tant de prestige qu’à hautes responsabilités, d’aller récupérer dare-dare le précieux trophée.

Au plus fort de l’excitation, certains ont bien failli passer à l’eau.

D’autres ont « fait perdre » le poisson à Luisito, les représailles ont été immédiates…

Bref des moments épiques dignes de notre illustre Raphaël Dacharry (Alias Léon).

Francis

J’ai volontairement gardé le « meilleur » pour la fin, j’ai nommé Francis Saint Laurent.

Francis était un enfant du quartier, il avait racheté le bar à « Agna », et l’avait rebaptisé « Chez Francis » (aujourd’hui Le Machicoulis).

Très tôt le matin, Francis ouvrait son bar à la hâte, non pas pour être opérationnel rapidement, mais plutôt pour pouvoir mettre à l’eau ses deux lancers lourds juste devant l’établissement, dans l’espoir de capturer la louvine du siècle.

Il faut dire que tenir un bar pour un pêcheur de louvines, ça se tient !

Une fois pleinement opérationnel, c’est-à-dire les cannes à l’eau, Francis revenait derrière son comptoir, non sans jeter un œil régulier (env. toutes les 10 secondes) aux scions des deux perches qui trônaient devant son établissement.

Bien entendu cette double casquette (cafetier/pêcheur) avait tendance à impacter légèrement la rapidité du service, surtout… surtout lorsqu’il avait détecté une touche !

Toujours sur Francis…

Je me souviens avec amusement des véritables crises qu’il attrapait, et qui se traduisaient par d’énormes manifestations sonores, lorsque les guirlandes des fêtes étaient installées, cela mettait à bas son légendaire coup de poignet, lors de ses non moins légendaires lancers.

Je conclurais en précisant que Francis était vraiment un bon gars, que j’ai eu beaucoup de plaisir à échanger avec lui durant de nombreuses années.

Pour celles et ceux qui auraient reconnu l’un des protagonistes, je suis preneur de tout anecdote à transmettre.

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